Psychosociologue reconnu et expert de la petite enfance, Jean Epstein est intervenu lors d’une conférence à l’occasion du congrès 2025 du réseau Les crèches de Tilio pour évoquer la bienveillance en crèche.
Bienveillance en crèche et éveil de l’enfant : une vision éclairée avec Jean Epstein
Lors de sa conférence, Jean Epstein a rappelé que dans les premières années de la vie, tout se joue. L’enfant explore le monde à travers ses sens, ses émotions, ses relations. L’adulte devient alors un guide, un repère sécurisant, qui l’accompagne dans son développement global : cognitif, émotionnel, social et physique.
Jean Epstein le souligne, être bienveillant, c’est avant tout respecter l’enfant dans ses besoins et dans ses compétences, l’aider à construire ses repères, et le valoriser dans ce qu’il est.
Il évoque également, en s’appuyant sur les neurosciences, le lien affectif fondamental qui se crée dès les premiers jours en crèche : « Dans les quinze jours suivant son arrivée, l’enfant arrête de produire l’odeur de sa mère pour adopter celle d’une référente, qu’il aura choisie instinctivement. Ce processus biologique témoigne de la capacité de l’enfant à se créer de nouveaux repères, à condition qu’il se sente entouré, sécurisé ».
Découvrez ci-dessous notre interview dans laquelle Jean Epstein nous livre sa vision de la bienveillance en crèche :
Comment instaurer un climat de bienveillance en crèche au quotidien ?
La bienveillance commence par l’équipe et surtout par la nécessité de partager des valeurs communes. Il est essentiel que chaque professionnel comprenne et adhère au projet de la structure, car une personne en décalage peut involontairement freiner la dynamique collective. La cohérence est fondamentale.
Ensuite, il faut reconnaître les compétences et les plaisirs de chacun : certains aiment chanter, d’autres animer des ateliers de motricité… Cette diversité nourrit la qualité de l’accueil. Il en va de même pour la relation avec les parents : il est important de les accompagner, de les écouter, mais aussi de poser un cadre clair sur les valeurs de la crèche, afin d’éviter toute incompréhension ou opposition passive.
Comment réagir face à des mots ou des phrases fortes que peuvent dire les enfants ?
L’écoute active est primordiale. Il ne s’agit pas de tout interpréter seul : le recours ponctuel à un psychologue dans la structure peut permettre de mieux comprendre certaines situations. Mais dans la plupart des cas, les professionnels sont les mieux placés pour entendre les enfants, parce qu’ils les observent au quotidien.
Qu’aimeriez-vous que les professionnels retiennent avant tout de votre intervention d’aujourd’hui ?
J’aimerais qu’ils prennent conscience de l’importance de leur rôle. Ce qu’ils font dépasse largement la petite enfance : ils posent aussi des bases qui auront un impact à l’adolescence et au-delà. Ils sont les mieux placés pour entendre et pour observer… mais ce n’est pas à eux de tout résoudre !
Leur rôle est d’écouter, de repérer des signaux, et d’orienter. Ils doivent connaître les ressources autour d’eux – médiation familiale, soutien, accompagnement parental – pour pouvoir guider les familles si besoin. Il ne faut pas tout porter, mais savoir où se situer.
Un message particulier à transmettre aux équipes de tout le réseau Tilio ?
Je pense que c’est le plus beau métier du monde. Aider des enfants et des adultes à se construire ensemble. Il n’y a rien de plus beau ! Et pourtant, on ne reconnaît pas encore assez cette importance en France. Contrairement à d’autres pays, vous êtes encore trop souvent vus comme des personnes qui jouent… alors que vous êtes des partenaires essentiels dans la société.
Pour conclure, la bienveillance, ce n’est pas simplement « être gentil » ou éviter les conflits. C’est un regard, une écoute, une posture exigeante et engagée. C’est aussi un travail d’équipe, une relation de confiance avec les familles, et un profond respect du développement de chaque enfant.